Description
MANESSIER, Une œuvre immense,
La série des sept lithographies de 1949, mais plus encore les quinze lithographies de 1978 sur le thème de Pâques, du passage de la nuit à la lumière, de la souffrance à la joie, de la mort à la résurrection, expriment la foi de Manessier uniquement avec des couleurs pures ou superposées (en lithographie, on effectue un passage par couleur, on ne les mélange pas sur une palette), et beaucoup de noir. Les couleurs, pas plus que la composition, ne résultent d’un choix esthétique mais de leur valeur expressive, de leur force émotionnelle : elles ont un sens « vécu » et en cela et seulement en cela elles « représentent » ce qu’elles « signifient ». Elles sont « symboliques » pour autant que leur sens est directement éprouvé parce qu’il renvoie à des expériences humaines « primaires », fondamentales, qui en font des signes : rouge/sang, rouge/feu, bleu/ciel, bleu/eau, jaune/sable, jaune/soleil, noir/nuit, noir/brûlé, blanc outre-couleur. Et puis griffures, déchirures déchirements, écorchures, transpercements, bousculements, éclatements, éclats, explosions, embrassements, embrasements.
Enfin, « suprême symbole » selon Louis Soutter, à la croisée du vertical et de l’horizontal, du ciel et de la terre, de la vie/résurrection et de la mort, le signe de la croix – signe et non pas (faut-il le préciser ?) représentation « réaliste », mais pas davantage élément d’un langage purement pictural comme chez Malevitch (dans le lexique suprématiste). Les trois croix de la planche IX de 1978 ne sont que mort et sang, mais sur fond de blancheur, comme le sang et l’eau de la planche X. Et dans la planche VIII c’est la croix elle-même qui déjà est Lumière.